07/09/2016
L’incompatibilité des professions d’architecte et d’entrepreneur
Droit immobilier, droit de la construction, troubles de voisinage
Par Jeoffrey Vigneron, Avocat au Barreau de Bruxelles.
Le principe de l’incompatibilité de ces deux professions est posé depuis l’élaboration de la première loi encadrant la profession d’architecte (loi du 20 février 1939).
La volonté du législateur était évidemment d’empêcher tout conflit d’intérêts entre deux intervenants majeurs du secteur de la construction.
Le contrôleur ne peut être le contrôlé.
En effet, la profession d’architecte a, entre autres, pour but d’assurer les intérêts du Maître d’ouvrage (ou du public). Cette mission peut, à certaines occasions, entrer en conflit avec l’entrepreneur dont les travaux sont contrôlés par l’architecte.
Dès lors afin d’éviter cette situation, le législateur a tout simplement posé le principe de l’interdiction du cumul de ces deux fonctions.
Cette obligation a pour but de garantir une certaine indépendance de l’architecte, tant au niveau financier que technique ou intellectuel.
A défaut, les architectes qui cumuleraient cette qualité avec la profession d’entrepreneur pourraient par exemple être tenté de procéder d’adopter des choix conceptuels moins couteux pour lui et au détriment des intérêts du maître d’ouvrage.
Si ce principe peut aisément se comprendre pour la profession d’architecte et celle d’entrepreneur, l’interdiction classique est plus difficile à appréhender en cas de cumul de qualité d’architecte et de promoteur.
La promotion est le mécanisme par lequel un bâtisseur s'engage à procurer à sa clientèle la propriété ou la jouissance d'un bien immeuble, à bâtir ou en cours de construction, en prestant la généralité des soins nécessaires à cet effet (Statut et responsabilité des édificateurs, Presses universitaires Saint-Louis, "Considérations concernant le contrat de promotion", par PAUL RIGAUX, p. 101);
Il existe de nombreux types de promotions impliquant une étude au cas par cas des situations existantes afin d’apprécier si le principe de l’indépendance de l’architecte peut être remis en question (promoteur-vendeur, promoteur-constructeur, promoteur-organisateur).
Quoi qu’il en soit, cette incompatibilité est d’ordre public et a pour sanction la nullité absolue de la convention.
Les Cours et Tribunaux belges ont donc sanctionné certains intervenants du secteur de la construction dans les cas suivants :
Les honoraires sont bradés, les procès-verbaux de chantier sont inexistants
L’architecte et l’entrepreneur se servent du même fax.
Les plans sont dessinés par un entrepreneur et signés par un architecte
Il y a une communauté d’intérêts entre l’architecte et l’entrepreneur abusant leurs clients
L’architecte choisi est payé par l’entrepreneur
L’existence de liens familiaux proches entre l’architecte et l’entrepreneur
Enfin, les conséquences de la nullité absolue d’un contrat sont les suivantes:
Celui-ci ne peut sortir aucun effet, à commencer par le paiement des prestations effectuées par l’architecte qui théoriquement doivent alors être remboursées. Les clauses limitatives de responsabilité ne peuvent pas plus s’appliquer.
A bon entendeur,